Je ne sais pas si c'est une tendance lourde de la rentrée mais j'ai l'impression qu'on ne peut plus regarder un tunnel de pubs bien peinard comme on le faisait avant avec son temps de cerveau disponible sans que maintenant, une célébrité ou une semi-célébrité, un sportif, un acteur, un mannequin marié à un sportif qui a joué dans une série, un gars qui est passé à la télé, bref un people comme on dit si joliment (Poésie moderne...) ne surgisse à chaque carrefour de l'hypermarché (ou à chaque hypermarché Carrefour). Quasiment chaque pub est dorénavant squattée par un ami-people-prescripteur-bienveillant qui nous offre ses précieux conseils de consommation.
Sans aucune espèce de conscience, si ce n'est sûrement celle de l'angoisse face à la réception de l'avis de tiers provisionnel, nos amis les peoples nous font donc de la retape indifféremment pour des banques, des compagnies d'assurances, des lunettes ou des plats micro-ondables. C'est pareil, mangez, consommez et recrachez tout. Quand vendront-ils leur image pour les labos pharmaceutiques (comme moi, prenez des benzodiazépines, vous serez heureux), des marchands de grenades (autour du cou ou en gourmette c'est du dernier chic), ou des trafiquants de Crystal Meth (beaucoup plus hype que la coke tant qu'à faire), quitte à tapiner pour les plus pourris ?
Après que Laeticia a rejoint son sémillant époux Johnny sur nos écrans, pour le meilleur et pour le pire de la vision de près comme de loin, c'est maintenant Adriana Karembeu qui, entre deux forfaits pour mobile, vend des lunettes qui ne lui vont pas (mais alors vraiment pas) avec Antoine, qui a toujours des cheveux longs mais pas assez de seins vraisemblablement. Myopie, SMS illimités et Croix Rouge, même combat. Un vieux chanteur et une blonde ça doit être la combinaison idéale pour bien faire vendre des double-foyers, je ne vois pas d'autre explication.
Quoiqu'un footballeur qui donne des coups de boule devant 12 millions de français aussi, puisque Zidane jongle chez l'opticien d'en face quelques minutes après nous avoir délivré un message d'une grande humanité au service d'une compagnie d'assurance (et avec l'accent marseillais). Un coup de boule, un grand écart, hop hop hop, quel champion. Oui comme tout footballeur qui se respecte il a déjà vendu des chaussures, des articles de sport, des forfaits téléphoniques, des magasins de hard discount, de l'eau minérale, des voitures, des yaourts, des bouquets satellites et même un programme des Nations Unies "Anti-Pauvreté" (si si), donc il est tout naturel de passer aux assureurs. Oui ceux-là mêmes qui vous bloquent votre dossier de prêt pour l'achat de votre appart de 30 m2 sur 25 ans si vous avez eu une opération de l'appendicite en 1982 et qui savent tout de vos dernières analyses sanguines (dites donc vous achetez un appart et vous avez du choléstérol, c'est pas très raisonnable ça M. Duchemin). C'est sûr, quand on s'appelle Zidane, on peut faire exploser son taux de choléstérol en renvoyant ses Danacol dans sa gueule à Jacques Weber (merci t'es sympa), c'est plus facile pour le prêt. Et ensuite on est plus détendu pour délivrer la bonne parole sur les ondes. Trop cool Zinedine.
Les assurances ne reculent d'ailleurs devant aucun élan de générosité spontanée puisqu'elles font même jouer les morts. Philippe Khorsand, même terrassé par un cancer, était toujours là cet été pour danser sur une reprise de "C'est la ouate que j'préfère". Efficace et pas cher ? Si ça c'est pas la preuve qu'ils se foutent de vos analyses médicales ? Mais bon pour le prélèvement mensuel c'est mieux d'être vivant quand même.
La grande distribution n'est pas en reste de peoples sympas dans l'allée centrale puisque Casino a chopé Christian Clavier pour faire la tête de gondole, pendant que le Super U d'en-face est toujours tenu par Daniel Prévost. A quand Isabelle Adjani chef de rayon chez Monoprix ? Ah non c'est vrai, elle vend déjà Paris Match à la criée sur le trottoir.
Pendant ce temps, Anne Roumanoff nous aguiche moulée de rouge et allongée sur un bureau pour promouvoir des classeurs 2 anneaux avec dos de 4 cm (bien sûr), Yves Lecoq fait de la retape pour des fenêtres double vitrage en imitant Chirac (logique), Jean-Marie Bigard vente les mérites d'un climatiseur (humour gras et air conditionné, la combinaison de rêve) et Pierre Arditi, jamais le dernier pour nous délivrer un beau discours bien-pensant sur n'importe quel plateau télé nous offre ensuite généreusement ses précieux conseils financiers en faisant l'article pour une banque qui, certes, n'a pas perdu récemment 3 milliards d'euros par "négligence" sans faire apparaître la moindre rougeur de honte face à ses clients. Demandez plus à votre argent donc.
D'ailleurs à peu près tous les comédiens de la place de Paris en ont bouffé du Lion, l'animal doit être généreux... Le milieu du cinéma est sûrement très aguerri sur les taux directeurs. Eric et Ramzy, eux, ont eu le courage de choisir l'originalité puisqu'ils ont l'incroyable audace de racoler les jeunes pour un concurrent du fauve dépensier. De vrais résistants. Et à bas les agios. Bien sûr tout ce petit monde reste totalement crédible en défendant la veuve et l'opprimé ou en nous gratifiant de leurs fines analyses sociologiques dès que l'occasion médiatique se présente dans les journaux et les talk-shows au moment de la sortie de leur dernier film (pas pendant les vacances quand même), tout en caressant allègrement de l'autre main le plus grand consortium de racket mondialement organisé que constitue la noble institution bancaire. Ben oui il est où le problème ? Yen a pas, ils prennent juste le pognon là où il est et pendant qu'il y en a, voilà une belle leçon d'humanisme et de solidarité à méditer. Tiens j'ai comme une envie de vomir moi.
(Photo : Ben / Chiloe, Chili - Mai 2008)